Les Zôpitaux et moi : L’initiative révolutionnaire pour une santé éclairée en Afrique francophone

Au Togo, il existe depuis plus de 06 ans maintenant un projet novateur « Les Zopitaux et Moi », qui vise à combler le déficit d’accès à la connaissance médicale et à promouvoir des comportements favorables à la santé au sein de la francophonie africaine. Découvrez comment cette initiative unique se démarque en offrant des contenus clairs, précis et ludiques, dans le but d’éduquer et de sensibiliser le public sur une multitude de sujets de santé à travers cet entretien avec Méhiugnim Tchabou, l’initiateur de ce projet.

Propos recueillis par Gilles LAWSON

Présentez-vous, docteur

Je me nomme Méhiugnim TCHABOU et je suis médecin généraliste. Je suis titulaire d’un DIU en e-santé et d’un Master en Stratégie et Gestion de l’Information au décours duquel je rédige une thèse dans le domaine de la santé numérique.

Je suis engagé dans les enjeux liés à l’information à l’éducation et à la communication en santé dans le but de promouvoir, non seulement, des comportements sains au sein de la population, mais aussi une culture ou des pratiques informationnelles adéquates dans les institutions sanitaires.

Je suis l’initiateur du projet « Les Zopitaux et Moi », une plateforme en ligne visant à sensibiliser, informer et éduquer la communauté sur des questions de santé. Notre ambition est de devenir un leader dans le domaine de l’information et de l’éducation en santé en Afrique francophone.

Comment est née l’idée de créer l’initiative et quelles étaient les motivations premières lors de son lancement ?

Les Zopitaux et Moi est né d’un constat. Une incommensurable carence d’accès à l’information en santé. Parmi les multiples dilemmes cruciaux auxquels ils sont confrontés, le déficit d’information sanitaire se hissa sans conteste au rang des plus acerbes. Il nous incombait donc de nous pencher résolument sur ce fléau et de le contrer, en élaborant une initiative dont le dessein serait d’éclairer, d’interagir et de cultiver notre communauté sur une pléiades de thématiques relatives à la santé.

Les Zopitaux et Moi se présente comme un concept dans le domaine de la santé et du bien-être. Expliquez-nous-en quoi votre projet c’est différencier des autres initiatives existantes en Afrique francophone

Modestement, Les Zopitaux et Moi a été l’un des pionniers dans le domaine de l’information et de l’éducation en santé en ligne. Dès 2017, nous avons entrepris de fournir les premiers contenus relatifs à la santé, instaurant une dynamique bien distincte. Notre initiative se démarque par son approche novatrice et ludique dans la communication numérique à notre communauté, offrant une diversité de contenus dans un langage accessible. Cette particularité est ce qui nous distingue réellement : proposer systématiquement des formats plaisants et adaptés, tout en maintenant une approche professionnelle et consciencieuse dans le contenu que nous offrons.

Parlant de contenu, vous en proposez qui sont de si clairs, précis, ludiques pour informer les internautes sur différents sujets de santé. Comment vous choisissez les thèmes à aborder et quelles sont vos méthodes pour rendre ces informations accessibles au grand public ?

En tant que témoins privilégiés lors de nos stages à l’hôpital, nous avons simplement identifié les sujets problématiques auxquels nous avons été confrontés. Nous avons rapidement constaté que certaines populations ne disposaient pas d’un accès adéquat à l’information sur des sujets spécifiques. Par la suite, nous avons établi un calendrier prévisionnel en nous appuyant sur notre connaissance approfondie des thèmes de santé qui touchent nos communautés, ainsi que sur leur niveau de familiarité avec ces sujets. Cela nous a permis de choisir judicieusement les thématiques abordées.

De plus, nous avons accordé une attention particulière à la santé des femmes, en particulier à la santé maternelle et infantile. Il était primordial pour nous de toucher cette frange de la population, qui se trouve être la plus vulnérable. Nous avons souvent souligné au sein de notre équipe que lorsque la santé d’une femme est préservée, la santé de l’ensemble de la cellule familiale en bénéficie généralement, ce qui souligne l’importance de cet aspect.

Maintenant, comment abordons-nous ces thèmes ? Comme mentionné précédemment, nous utilisons des formats ludiques. Nous avons constaté que le format audiovisuel était particulièrement efficace, surtout sur Internet. La santé est déjà un sujet complexe à appréhender, même pour les professionnels de la santé, et encore plus pour ceux qui ne le sont pas. Par conséquent, nous avons choisi un canal d’information qui n’est pas nécessairement le plus facile pour transmettre des informations qui ne sont pas faciles à comprendre. Vous comprenez qu’il était nécessaire d’être ingénieux afin de captiver notre communauté. C’est pourquoi nous proposons des formats ludiques, tels que des infographies qui présentent des informations courtes et simples, rédigées dans un langage accessible. De plus, nous proposons de courtes vidéos explicatives sur certains sujets.

Nous avons également organisé des sessions en direct avec des professionnels de la santé qui répondaient aux questions de notre audience. Nous avons donc choisi d’utiliser plusieurs formats ludiques en ligne, afin d’attirer l’attention des personnes qui fréquentent les réseaux sociaux, non seulement par des divertissements, mais aussi par des informations fiables et pertinentes en matière de santé.

Vous organisez des événements en ligne tels que les Live Stream avec les professionnels de la santé et également des sensibilisations sur l’hygiène menstruelle. Comment sélectionnez-vous les participants et les partenaires pour ces actions ?

Comme je l’ai mentionné précédemment, l’une de nos thématiques de prédilection est la santé des femmes. Ainsi, nous avons lancé plusieurs campagnes portant sur des sujets tels que l’hygiène menstruelle et les cancers gynécologiques. Nous avons également abordé les maladies non transmissibles. En ce qui concerne les participants, il convient de souligner que les femmes représentent généralement la grande majorité des participants à nos campagnes de sensibilisation hors ligne. Quant à nos partenaires, après que certains ont pu constater notre

action sur le terrain, nous avons eu la chance de collaborer avec certains d’entre eux, tels que l’OMS Togo, le Comité International de la Croix-Rouge (CICR), ainsi que le Centre National de Transfusion Sanguine (CNTS). Ces partenaires partagent nos préoccupations et nos thématiques, et nous ont accompagnés durant certaines activités. Nous leur adressons nos sincères remerciements.

Est-ce que vous avez quelques exemples de réussite, des moments marquants dans l’histoire de votre initiative, notamment en termes d’impact sur la communauté locale à nous donner ?

L’une de nos premières campagnes digitales a été consacrée au cancer du sein. Nous avons été submergés par la participation massive à cette campagne, dont l’objectif principal était de sensibiliser la population à la méthode de dépistage précoce du cancer du sein chez les femmes, à savoir l’auto-examen des seins. Cette campagne a suscité l’engouement de nombreuses femmes, ainsi que d’hommes d’ailleurs, qui ont activement pris part à cette initiative. Nous avons créé un cadre aux couleurs de la campagne où les participant.e.s pouvaient partager des photos illustrant la manière de réaliser une autopalpation des seins. L’enthousiasme qui a entouré cette campagne nous a réellement touchés et nous en avons été profondément reconnaissants.

Une autre campagne digitale qui a marqué nos esprits était axée sur l’hygiène menstruelle, en partenariat avec une association locale, PLAN INTERNATIONAL. Cette campagne a rencontré un succès retentissant et a suscité un écho considérable. De plus, nous avons eu le privilège d’organiser une campagne hors ligne sur le cancer du sein, au cours de laquelle plus d’une centaine de jeunes filles sont venues se faire dépister sur place, accompagnées de sage- femmes bienveillantes. Ces campagnes visent à promouvoir des méthodes de dépistage précoce qui permettent aux femmes de détecter d’éventuelles anomalies ou lésions. Par la suite, cela les incite à poursuivre avec des examens complémentaires. Ces initiatives sont porteuses d’espoir et contribuent à sauver des vies.

Aujourd’hui, nous recevons de nombreux témoignages émouvants sur nos différents comptes. Ces témoignages reflètent l’impact de nos messages et informations qui, parfois, viennent à point nommé. Nous avons réussi à dissiper certains mythes et préjugés qui se sont avérés infondés. Les retours que nous recevons nous réchauffent le cœur et nous encouragent à poursuivre notre engagement avec encore plus de détermination.

Comment s’est-elle construite cette équipe ? Qui la constitue et quelles sont les compétences complémentaires que chacun des membres apporte au projet ?

L’équipe s’est formée progressivement, avec un démarrage modeste. Quelques collègues qui partageaient la même vision m’ont rejoint et ensemble nous utilisions nos compétences graphiques rudimentaires pour créer du contenu. Mais au fur et à mesure que l’initiative prenait de l’ampleur, d’autres compétences se sont ralliées à notre cause. Nous avons eu la chance de voir des volontaires enthousiastes rejoindre notre équipe. Au final, notre équipe compte une douzaine de membres, dont la majorité est composée de médecins. Les autres membres sont des professionnels du multimédia, notamment un vidéaste et un graphiste.

La diversité des compétences au sein de notre équipe a contribué à rendre notre contenu plus professionnel et notre présentation plus soignée. Chaque membre a apporté son expertise pour améliorer continuellement la qualité de notre travail.

Comment envisagez-vous l’évolution des « Les Zopitaux et Moi » dans les prochaines années tant au niveau de l’extension géographique que du développement de nouveaux services ou partenariats ?

Les Zopitaux et Moi aspire à devenir un leader de l’information et de l’éducation en santé en Afrique francophone. Notre ambition est de nous étendre dans des pays tels que le Bénin, la

Côte d’Ivoire et d’autres pays de l’Afrique francophone afin que tout le monde puisse avoir accès à l’information dont il a besoin. Notre priorité immédiate est de nous assurer que tous les Togolais, en particulier ceux qui ont peu de ressources, puissent accéder à l’information, que ce soit par le biais de notre plateforme ou par d’autres moyens.

Nous ne pouvons prétendre être les seuls à mener cette mission. C’est pourquoi nous cherchons également à encourager et à soutenir d’autres initiatives sur le terrain. Notre objectif est de motiver et d’influencer d’autres acteurs à se joindre à nous, afin que chaque citoyen puisse devenir acteur de sa propre santé, que cela soit grâce à notre initiative ou à d’autres initiatives similaires. Nous voulons que l’information médicale parvienne au plus près de la population, et cela passe par la multiplication des initiatives dans différents pays.

Nous sommes également ouverts à des partenariats avec d’autres acteurs dans la région.

Dans une perspective de développement, d’autres projets ont vu le jour dont la sortie de notre Premier Magazine Santé : Le ZopiMag. La mise en place d’un nouveau format de vidéo animation sur les sujets de santé et la tenue imminente de notre émission santé.

Si vous devez donner un conseil à des futurs acteurs souhaitant se lancer dans une initiative similaire, que leur direz-vous ?

De s’y lancer, car c’est souvent le plus dur. Comme je l’ai mentionné précédemment, la santé n’est pas toujours très appréciée sur les réseaux sociaux. Il est donc primordial de trouver des moyens de rendre l’information à la fois pertinente et intéressante, afin que les gens puissent la consommer. Il faut donc qu’ils soient patients et persévérants.